En fait, ces deux histoires ne sont pas si éloignées l'une de l'autre. On plonge à chaque fois dans l'esprit relativement dérangé d'un personnage. Certes, dans le premier cas, le personnage est fictif et schizophrène, pensant que personne ne remarque qu'il a coupé sa moustache qu'il porte pourtant depuis plusieurs décennies. Dans "L'adversaire", le tableau est plus difficile: on suit la double-vie du "docteur" Romand, absolument pas docteur, qui mentit à ton son entourage pendant de nombreuses années avant d'assassiner toute sa famille, et notamment ses enfants et sa femme.
"La Moustache" nous plonge dans le doute. Au fur et à mesure des pages, on a l'impression terrible qu'il serait si aisé de rendre n'importe qui fou, niant les évidences, non sans l'aide de complices. Lorsque la paranoïa s'installe fortement, les craintes de plus en plus violentes, on comprends que notre moustachu est bien celui qui affabule et invente. Si certains passages sont parfois un peu longs, j'ai bien aimé ce petit bouquin, notamment la tournure qu'il prend sur le dernier tiers...
"L'adversaire" nous fait tenter de comprendre ce qu'il a pu se passer dans la tête de Jean-Claude Romand pour en arriver là où il est (en prison). Depuis examen de deuxième année de médecine raté pour un incident médical, cet homme fera croire à tout le monde qu'il est médecin à l'OMS et un éminent citoyen de sa région. Carrère a mené un enquête discrète, suivi le procès et est entré en contacte avec Romand pour nous écrire son bouquin, mêlant cette histoire et parfois, sa trajectoire personnelle (ce que j’avais déjà aimé dans "Limonov").
Deux romans adaptés au ciné. Je n'ai vu aucun des deux films mais cela ne devrait pas durer.